Vingt fois sur le métier, remettez votre ouvrage.
Parfois je suis très mal informé. Bien qu’une
impression, une intuition m’amène à prendre plutôt position pour l’une ou l’autre
thèse d’un débat, j’admets mon inconnaissance, mon incapacité à argumenter ou à
défendre sérieusement une position bien mal étayée.
Même face à moi-même, en me rasant par exemple (car ce n’est
pas pour me vanter, mais je me rase), j’ai du mal à me justifier, à m’offrir
une bonne pensée bien claire, limpide, rayonnante, et efficace ! Pour m’aider
à prendre position, et en particulier lorsque je suis pressé, je m’appuie sur 2
fidèles règles, sur 2 méthodes, sur 2 procédures, qui me permettent d’affirmer
mon intime conviction, et avec la sereine certitude d’avoir raison, d’être dans
le vrai !
La première est simple et tranquille… : j’ai des
principes !
Oui, je sais, ce n’est pas brillant de prendre position en
fonction de principes. Si la justice devait se résoudre à juger en fonction de
principes, nous reviendrions bien vite à la Loi du Talion, qui est une beau
principe par ailleurs, délicieusement archaïque, et permettant de mettre en
avant nos plus primaires attitudes, fondamentales, animales... hum, que ça fait
du bien.
Par exemple, lorsque je suis enclin à craindre l’« étranger »,
et à l’affubler de mille défauts, et de le dix mille maux, mon principe me tape sur l’épaule,
avec bienveillance, pour me rappeler « Euh, mon cher Roger, toi dont le
front haut déborde des nuages, ne crois-tu pas que tu dérailles, là ? ».
Et je me ressaisis ! Même Dieudonné me deviendrait humain dans ces instants
de lucidité !
L’autre méthode est également belle et claire : je me
réfère au propos de… la famille Le Pen. Non non, ne prenez pas cet air étonné
et réprobateur. Par exemple, Le Pen (père) twitte une félicitation pour le
projet de loi espagnol sur l’avortement ? Super, si ma conviction n’était
pas faite, je sais qu’il s’agit là d’un projet scélérat, d’un complot
anti-femme, liberticide, et rétrograde J
Facile non ?
Autre exemple… La fille de Dieudonné a un parrain
exceptionnel : Le Pen (père). Ça me permet de savoir, bien que n’ayant pas
eu le bonheur de voir le spectacle de cet artiste admirable, qu’il n’est pas
très fréquentable, et que ses propos sont haineux, arriérés, déplacés, anti-Lumière
…
On peut étendre les références
à ne pas suivre à d’autres personnages, ou groupes de pensées. Les cul-bénis
en feraient bien partie. Mais il faut quand même faire attention : j’ai d’excellents
amis qui croient en Dieu, qui sont même des militants de Dieu ! Alors ça c’est
chiant… Et avouons-le, j’admire quelques personnes qui croient en Dieu : Albert Camus,
Albert Jacquart, Alexandre Jollien, un prof de français de quand j’étais
lycéen, Stephen Hawking, et 2 ou 3 000 autres. Alors c’est pas forcément
un bon plan. En plus, je suis baptisé, même si je ne l’ai pas décidé, faudrait-il considérer que même mes proches sont systématiquement contestables…
Non non, ce n’est pas un bon exemple… qui me ferait ignorer
l’abbé Pierre, Mère Theresa, Saint‑Augustin.
Allez, restons sur la famille Le Pen, et leur groupe de « pensée »,
là au moins, nous sommes en terrain sûr et intangible.
En attendant, la droite populaire espagnole, et Le Pen (père)
prennent position contre l’avortement.
Et voilà qu’une fois encore nous pouvons nous dire que « rien
n’est jamais acquis », c’est un peu chiant c’est vrai, mais c’est comme
ça. Ils vont manifester dimanche, tous ces rétrogrades dont beaucoup de
cul-bénis, alors ne baissons pas la garde.
Ils vont essayer une fois encore de limiter le libre choix,
d’attaquer la liberté et la libre pensée. Nous pourrons relire ou réécouter Simone
Veil devant l’Assemblée, et de nouveau avoir les larmes aux yeux, devant cette
femme cumulant tous les défauts (juive, femme, de droite (oui, le centre est à
droite), et sans doute beaucoup d’autres), et que pour ma part j’admire sans
mesure. D’autant qu’elle aurait pu être ma voisine : j’habite à Drancy.
Alors, face à l’obscurantisme de cette droite populaire (je
n’aime pas trop qu’on rapproche « droite » et « peuple »,
mais ça permet de savoir de qui on parle, depuis Maurras jusqu’à Thierry Mariani),
face à l’obscurantisme donc, seule la connaissance, l’intelligence, la
formation, la réflexion sont des armes. Vingt
fois sur le métier remettez votre ouvrage, ce qui se conçoit bien s’énonce
clairement…
Nous n’avons pas fini d’essayer d’acquérir ce que nous avons
déjà, même si nous avançons. Et si nous restons vigilants, peut-être ne
reculerons-nous pas ? J’espère ainsi, que je n’aurai jamais à cacher des
amis ou des inconnus (juifs ou autres) dans ma cave, dans mon grenier. Mais si
c’était le cas, si nous devions revenir 70 ans en arrière, je sais quel est mon
camp.
Je le sais car je sais que je suis du côté des pensées humanitaires, et
que j’ouvrirais ma porte, plutôt que de la fermer. Dussé-je prendre un risque
si grave !
A cet égard Luis Peral Guerra (sénateur du Parti Populaire,
initiateur du projet de loi espagnol contre l’avortement), se réclame des
mouvements humanitaires ! C’est le monde à l’envers, qui permet de voir la
perfidie de ces hommes, qui se prennent pour Voltaire, ou se réclame de Léon Blum !
Comme quoi…